être vache

24 oct. 12
À la suite de pluies diluviennes,

en l'espace d'une heure, le chantier à la maison a pris des allures catastrophiques et nous voici empêtres dans la boue … Comment ne pas tomber dans la morosité devant cet envahissement? Comment se détacher d'un événement si physique - l'eau, le brouillard, la boue - si prégnant qu'il nous interdit toute distance? … Être vache ! Voilà simplement à quoi j'aspire en ce moment! Chercher à acquérir leur placidité, trouver ce calme absolu qui offre à l'environnement un corps poreux. Traversable. Comme elles, accepter la pluie, le froid, le soleil comme s'il n'était question que de contingences légères et sans conséquences. S'offrir juste un peu de confort : s'orienter suivant le vent, se mettre à l'abri d'une haie … La vache sait ce qu'elle a à faire: vivre. Elle sait qu'elle doit juste chercher ce qui est le meilleur pour elle, pour assurer le lendemain, la suite de l'histoire. (Un peu d'envie pour le champ d'à côté.) Constamment, jour après jour, son indolence lui permet d'encaisser les agressions du monde. Ne pas répondre, ou juste dire l'ennui, guetter la lenteur de l'herbe et faire corps avec le paysage. Elle entre dans le paysage, comme le paysage lui rentre dedans … faire partie de … en être. Il n'est question que de survie. D'une survie solitaire … qui jamais ne reniera la conscience du troupeau. La paresse et l'obstination deviennent des armes, face à la turbulence, face à un monde où il faudrait toujours répondre dans l'instant et si possible être brillant … faire face. La vache, elle, est terne, elle n'affronte pas, prête le flanc. Mais ne la méprisez pas trop vite, ne lui tournez pas le dos car elle est là, toujours … et toujours silencieusement prête.
On peut les croire sournoises … elles sont juste vigilantes.