le pot de Reviers

05 oct. 16

J’ai trouvé ce week end, sur une foire à tout, ce petit pot

… que j’ai fait, il y a je pense pas loin de 35 ans. Il est signé Reviers RT, ce qui me fait dire qu’il est de la première période puisque les pièces de l’atelier Raymond Thomas furent après signées Reviers RT-PG. Je regarde toujours sur les étals de brocante si je trouve des pots de cette époque. On en a tant produit … 12 m3 par an pendant dix ans … vendus aux gens de la région et j’en retrouve si peu! L’atelier a continué de fonctionner pendant plus de dix ans après mon départ ( Frank Aumont y a trouvé sa place). J’y étais venu pour quelques temps et j’y suis resté. C’est l’intelligence de Raymond Thomas, qui m’y a fait rester, sa gentillesse et son humilité. Il était venu à la poterie par hasard … pour s’échapper d’une vie parisienne qui ne lui convenait pas ( 1968: tentatives communautaires, Raymond avec Yves Guiraud rêvaient d’ailleurs. Ils tentèrent de le construite à Reviers (calvados) ). J’ai rencontré Raymond quelques années après, alors qu’il construisait un nouveau four dans un atelier indépendant. Il me proposa de le faire avec lui, ce que j’ai accepté sans hésitations. J’ai alors quitté le lycée pour venir travailler dans son atelier, rue de l’église. Il voulait prendre le temps, partager sa vie avec ses amis. La poterie le lui a permis et il a l’a pratiquée sans aucune autre prétention que d’être le potier du village. Dix ans de partage sans encombres, sans histoires d’argent (on prenait dans la caisse ce dont on avait besoin sans tenir aucun compte!), sans jalousie. Sans secrets non plus, tout était toujours partagé. Il a toujours fait en sorte que je ne reste pas prisonnier du chemin qu’il s’était tracé. Il me poussait à travailler pour moi, à côté de la production de l’atelier, à poursuivre mes recherches personnelles. Il me poussait à présenter des pièces dans des expositions, lui voulait juste être là et vivre tranquillement au rythme des apéritifs. Le simple fait de me permettre de travailler à ses côtés répondait à ses besoins de transmission. Il n’avait peur que de la solitude. Dire qu’il m’a tout appris serait faux : il a tout fait pour que j’apprenne. Il a toujours tout permis pour que je puisse apprendre … chez les autres surtout, et à aucun moment ne s’est positionné ni en maître, ni en exemple. On se souvient de son humour et de sa constante dérision, mais je sais que tout cela était tendu par une profonde révolte et une incapacité totale à se soumettre. J’espère avoir appris au moins ça de lui! Qu’hommage lui soit rendu en toute fraternité. Je n’ai jamais beaucoup parlé de ce moment à Reviers. Et je n’ai jamais beaucoup échangé sur la relation que j’entretenais avec lui; mi élève, mi collègue … ami et même complice de toute façon … mais ces années furent pour moi décisives et permirent sans aucun doute la suite de l’histoire.

Ce petit vase est tourné en terre de Noron la poterie, cuit au bois vers 1170°, et mesure 7,5cm de haut pour un diametre de 7 cm. L'émail, autant qu'il m'en souvienne, etait un émail blanc de faïence de chez Ceradel que l'on sur-cuisait … M50 peut -être? Je l'ai racheté 2 euros ... ce qui ne doit pas être très loin du prix vendu alors.