l'été pourri
Il pleut et l’été, d’un coup, s’enrobe un peu d’ennui.
Le jardin pourtant en profite, reverdissant, regagnant un peu de vitalité. Mais l’entrée de l’atelier entre les fenouils en fleurs qui ploient sous le poids de l’eau est de moins en moins accessible. Entrée secrète de la caverne, entrée de l’antre; n’y arrivent que ceux qui le veulent! Je retrouve, à mon retour, les premières pièces émaillées pour Sèvres et me dis qu’il serait bien que j’y revienne. En fait, les choses m’intéressent quand elles ne sont pas finies. Quand elles restent en suspens, en déséquilibre instable. Comme si le monde s’arrêtait un instant et que l’on s’attende à ce qu’il re-démarre. L’entre-temps. C’est une histoire de tension interne aux œuvres, une histoire d’inconfort pourtant si voluptueux; les pièces entrent dans un cycle sans fin … par moment je les aime et l’instant d’après je les trouve imparfaites. Le jour et la nuit. Ça se déroule jusqu’à l’usure … peut-être est ce alors qu’elles sont terminées? L’atelier est resté fermé pendant notre séjour chez Coralie et Gaelle, et quand j’ouvre la porte, ça sent un peu le pourri. C’est le brou de noix qui macère. Je l’avais rentré avant de partir, par peur des orages, peur qu’il se délaye et s’affadisse. Il trempouille depuis l’automne dernier et commence à prendre du corps, de l’épaisseur. Je vais pouvoir bientôt dessiner avec cette mixture puante de nouvelle génération! Quand ce n'est pas la terre qui moisit, c'est le brou … le travail n'est finalement qu'une éternelle transmutation de la pourriture.
image : le ciel à Lousbeny le 29 07 17