réparations
Notre visite au centre Pompidou la semaine dernière,
nous a permis Catherine et moi de découvrir le diaporama de Kader Attia ”the repair”. 80 diapositives projetées sur deux écrans contigus évoquant la réparation des objets africains mis en parallèle avec les réparations chirurgicales tentées sur les ”gueules cassées” après la guerre de 14. Dans le même sens, la pièce de Thomas Hirschhorn ”Outgrowth”, présente aussi dans ce nouvel accrochage des collections, évoque les tentatives de réparations d’un monde qui n’en finit pas de se fêler de tous côtés. Dans la tradition de la céramique d’extrème orient, il est d’usage de considérer que les réparations font partie de la vie des objets … et qu’elles peuvent même les magnifier. Plus questions alors de les cacher mais bien au contraire de les montrer comme l’on exhiberait une cicatrice héroïque. La technique du kintsugi soulignant à la poudre d’or les cassures, illustre comment le point de vue japonais considère le passé des objets. Tout le passé, y compris les accidents qui purent l’émailler. Le kintsugi fut inventé pour remplacer les agrafes utilisées avant pour réparer les céramiques … j’ai toujours, malgré tout, aimé ces agrafes témoignant d’une volonté de garder le corps des choses même quand celui là change avec le temps. La grande exposition indigo vue au musée de Clermont montrait des ”Boros”: kimonos de travail sans cesse raccommodés au point que le tissus d’origine n’apparait plus que partiellement. La réparation est affaire de nécessité. Elle permet de continuer à utiliser les choses tout en changeant leur aspect, la forme et la matière. C’est en cela qu’elle devient véritablement sculpture. C’est flagrant dans l’oeuvre de Kader Attia et c’est ce qui m’a toujours amené à utiliser de tels objets et à porter de tels vêtements. Catherine, de son côté, s’est toujours évertué à réparer tout ce qui se casse … refusant systématiquement de jeter tant que l’usure n’est pas absolument irréparable. Défier l’outrage du temps en bricolant au point que les formes d’origines ( pensées ou pas) deviennent obsolètes, faisant naître ainsi une esthétique qui serait peut-être de l’ordre d’un anti-design. Une esthétique de la pauvreté qui doit toute sa richesse à l’invention plastique qu’elle met en œuvre.
image : le sucrier de la maison - porcelaine, bambou et bois de pommier réparé au fil de laiton.