toujours recommencé
Je compte le livre des cuissons.
J’aurais donc allumé mon petit four 74 fois en un an !
Répétition assidue d’un geste prometteur et pourtant si souvent décevant.
Rarement les résultats correspondent à ce que j’attends. Plus rarement encore dépassent-ils mes espoirs. La multiplication des expériences ne change en rien les données du problème et la complexité des couleurs rend les choses difficiles. Tout est affaire de choix, de décision à prendre.
Aucune loi, aucune règle, aucune façon de faire qui serait valable à tous les coups.
Je dois constamment m’adapter, inventer. Regarder ce qui sort et attendre parfois plusieurs jours pour vraiment voir ce qui est cuit. Il faut du temps pour se détacher des projets et apprécier ce qui est advenu.
Le désir trouble le regard.
J’ouvre le four le soir et ne vois les résultats réellement que le matin. Les couleurs demandent beaucoup de lumière pour se livrer. Beaucoup de lumière et beaucoup de distance.
Les buses tournent très haut au-dessus de l’atelier. Criant. Les petits sont sortis des nids des grands arbres du bois d'Orbandel et essayent de rester groupés. L’expérience des courants leur manque encore un peu et ils se retrouvent vite séparés les uns des autres. Plus tard ils trouveront naturellement les spirales ascendantes.
Je travaille un peu au jardin, les genoux dans la terre, les yeux à hauteur du vert. Quelques coquelicots fleurissent encore tardivement. Des taches rouges parmi les chrysanthèmes comestibles.
Catherine s’inquiète du défournement:
- Alors ? Les pots ?
- Je ne sais pas.
Mais je ne sais jamais